COVID-19 : Histoires de nos employés
Ange G. - Infirmière autorisée - Hôpital Saint-Vincent
Ce fut un mois de mars différent pour moi
en 2020. Le monde était en pleine ébullition suite aux changements brusques
qu’a apportés ce qui devenait la pandémie mondiale du COVID-19. Je retournais
d’un séjour de 11 jours en Angleterre ; tous les voyageurs étaient avertis
de retourner au pays avant le confinement et s’isoler pendant 14 jours. Ce
sera lors de mon isolement que je constaterai que j’éprouve des symptômes de la
grippe.
Au début, je me suis dit que ce n’était
peut-être rien et que cela passerait. Cependant, plus les jours avançaient,
plus je ressentais le fardeau en tant que professionnelle de la santé, de
protéger mes patients en faisant un test. Dans ma tête la question qui se
répétait était « si je ne le fais pas pour moi ; peut-être, le faire pour mes
patients ». En tant que professionnels de la santé, nous pourrions
inconsciemment avoir ce sentiment d’invulnérabilité. Dans tous les cas le
danger est inhérent de par la nature de notre profession. Qu’est-ce que ce
virus ? Nous rencontrons déjà toutes sortes de maladies au travail.
Semblerait-il que cela n’arrive qu’aux autres et pas à nous ? Laissez-moi vous
dire que recevoir un diagnostic positif à une infection ou à une maladie nous
laisse tous vulnérables. J’aime me dire : « je suis ma première
patiente ! »
Et c’est en mars 2020 que j’ai très bien
compris cette devise. C’est en restant isolée dans ma chambre, avec beaucoup de
questions et de peur, que la pandémie de COVID-19 était devenue une réalité pour
moi. En effet, le nombre de cas aux nouvelles n’était plus de statistiques pour
moi, j’en faisais partie. Ce nombre représente des personnes réelles qui vivent
parmi nous et qui ont de personnes qui tiennent à eux. Heureusement pour moi
les symptômes ne s’étaient pas aggravés et le besoin d’être hospitalisé ne
s’était jamais présenté. Suite à cette infection, je me ferai tester quatre
fois avant d’être déclarée négative au COVID-19 et de pouvoir retourner au
travail.
Le
30 avril 2020, je suis retournée au travail après presque deux mois hors
du milieu hospitalier. J’étais remplie de sentiments de gratitude et de fierté.
J’ai mieux compris l’importance de la santé et le privilège que j’ai en tant
que fournisseuse de services de santé et travailleuse aux fronts. Pour moi je
dirai que je puisais ma force dans ma foi en Jésus ainsi que le soutien et
l’amour de ma famille durant ces moments difficiles. J’ai pu mieux apprécier
les instructions sanitaires offertes par la santé publique et les services de
santé et sécurité au travail. Aujourd’hui ces moments de solitudes, de peurs,
et d’inquiétudes face à la pandémie du COVID-19 ne sont rien d’autre qu’une
histoire ; mais une histoire que j’aimerais fortement relater aux autres et en
garder les leçons au travers d’un livre.
Karen L. - Directrice, Service de soutien thérapeutique
Les semaines précédant le 13 mars, j’étais en vacances. C’était le congé de mars et je passais du temps avec deux de mes filles, à la maison pendant une semaine pour « étudier ». Ma semaine a été remplie d’activités : ski, patinage sur le canal, yoga, magasinage et sorties au restaurant… la vie était belle. :)
Puis, le 15 mars arrive et ma vie de béatitude n’était plus qu’un lointain souvenir.
Comme tout le monde à Bruyère, je me suis mise immédiatement au travail. Mon équipe et moi devions adapter notre modèle de prestation de services afin de pouvoir continuer à répondre aux besoins de nos patients, de nos résidents et des membres de leur famille pendant une pandémie mondiale. En très peu de temps, un système centralisé destiné à faciliter les visites virtuelles a été créé et le poste d’auxiliaire d’unité a commencé à s’imposer au sein de l’organisme.
La longue fin de semaine de mai, j’ai commencé à me sentir mal. Cela a commencé par un mal de gorge, des frissons, des maux de tête et tous les symptômes habituels quand on a attrapé « quelque chose ».
Plutôt que de prendre un peu de temps pour me reposer et refaire le plein d’énergie, je suis allée faire un tour à vélo pour m’en débarrasser en transpirant. À ce moment-là, il y avait une clinique COVID et je suis allée passer un test, juste pour être sûre, car je voulais retourner au travail la conscience tranquille. En raison du résultat négatif de mon test, j’étais persuadée que la toux persistante et irritante que je ressentais allait bientôt disparaître, et j’étais rassurée.
Le 11 juin, je savais que j’avais besoin de faire une pause. Ma toux irritante s’était transformée en ce que tout le monde et moi-même pensions être une bronchite. Rien qu’un peu de repos et de relaxation et des antibiotiques ne puissent régler. Encore faux. Même si je voulais désespérément que ces antibiotiques fonctionnent, je n’ai pas eu cette chance.
Au cours des semaines suivantes, un sentiment étrange, comme je n’en avais jamais ressenti auparavant, a commencé à m’envahir — un malaise total. J’ai perdu le sens de goût et de l’odorat, j’ai eu une étrange éruption cutanée, j’ai entendu des acouphènes et je ne pouvais plus bouger.
J’ai la « COVID longue ». Pendant des semaines, j’ai été dans le déni parce que dans mon cerveau, la COVID était quelque chose qui frappait les personnes âgées ou des personnes ayant déjà des problèmes de santé et je n’appartenais à aucune de ces catégories. Avant la COVID-19, j’étais une femme de carrière active qui parcourait 25 km à vélo pour se rendre au travail!
Bien que mes symptômes reviennent toujours par vagues, je m’adapte à la vie avec la COVID. Il n’y a pas de remède, mais j’ai découvert qu’il y a des choses que je peux faire pour moi-même et qui contribuent à ma guérison. J’ai créé un blogue inspiré par mon expérience dans l’espoir d’aider d’autres personnes qui pourraient avoir des difficultés pendant ces folles journées de COVID : www.coffeeandchardonnay.com.
Tout au long de mon parcours, la seule chose qui est restée constante ces 31 dernières années est mon amour et mon attachement pour Bruyère.
L’année dernière, j’ai vu Bruyère réagir à un tsunami et observé le travail incroyable que vous avez fait pour maintenir le bateau à flot. Je n’ai jamais été aussi fière de travailler pour cet organisme.
Je sais que les eaux ne sont pas encore calmes et qu’il y aura peut-être des vagues, mais je suis sûre que Bruyère est sur la bonne voie et s’en sortira brillamment.
Allez l’équipe, on ne lâche pas!
Nicholas K. - Institut de recherche Bruyère
Mon rôle actuel est celui d’intervenant pivot dans le cadre du projet Accès aux ressources communautaires (ARC), à l’Institut de recherche Bruyère, sous la direction de la chef de projet, Simone Dahrouge.
Le projet ARC est un modèle de navigation centré sur le patient qui vise à aider les individus à surmonter les obstacles et à accéder aux ressources qui répondent à leurs besoins sanitaires et sociaux. Nous mettons en contact les patients qui éprouvent des besoins liés à l’isolement social, à l’anxiété, à la dépression, à l’insécurité alimentaire, à la perte de revenus et à tout autre problème dû à la pandémie, avec des ressources locales et virtuelles.
Nous mettons actuellement en œuvre le modèle d’intervenant pivot ARC dans les régions de Merrickville-Wolford et de North Dundas, où nous invitons les fournisseurs de soins primaires de la région à orienter leurs patients vers le projet ARC pour qu’ils bénéficient de nos services d’orientation.
Depuis que je travaille comme intervenant pivot dans le projet ARC, j’ai pu voir les effets réels de la pandémie sur les familles et la population générale. Je reçois souvent des patients qui sont en difficulté financière parce qu’ils ont perdu leur emploi à cause de la pandémie et ne peuvent plus subvenir aux besoins de leur famille, et qui ont l’impression de ne pas avoir été à la hauteur. Comme la pandémie a également engendré des problèmes de santé mentale, les patients dont le médecin de famille les a envoyés voir un intervenant pivot ont en grande majorité déclaré qu’ils auraient aimé recevoir de l’aide en santé mentale dès le début de la pandémie. La plupart du temps, la détresse est liée à la perte d’un emploi, mais j’ai également constaté beaucoup d’anxiété, de dépression et d’isolement social en raison de la peur que les gens ont pour un proche.
Depuis que je travaille en temps de pandémie avec des personnes qui se sont retrouvées dans des situations difficiles, je suis reconnaissant des choses que je considérais comme normales chaque jour, comme avoir un travail et de la nourriture sur la table tous les jours. Pour certains, ce sont des choses qu’ils ont du mal à fournir à leur famille et je ne pense pas que je voudrais être dans une telle situation.
Daniel - Bénévole à la résidence Saint-Louis
La pandémie de COVID 19 a validé mon engagement auprès des aînés !
Je suis arrivé au Canada en 2019. En février 2020, j’ai commencé mon activité bénévole à la RSL.
Quelques semaines après que j’ai commencé mon bénévolat, il y a eu la première crise de COVID-19 à la RSL. Suite aux éclosions, les bénévoles n’étaient pas permit de visiter le foyer. Les résidents me manquaient énormément et je tenais à les apporter du soutien.
Aussitôt, que la quarantaine a été levée, malgré la pandémie, j’ai informé, Mariama Diallo, coordonnatrice des bénévoles, mon intérêt de continuer à exercer mes fonctions de bénévolat, Les mesures de protections mise en place m’ont rassurée.
J’étais heureux de reprendre mes activités de bénévolat. Mes tâches consistent entre autres, à faire des visites amicales afin de briser la solitude, alimenter les résidents et offrir du soutien au personnel. La satisfaction d’offrir du support aux personnes vulnérables, m’a confirmée la passion d’entreprendre une carrière dans ce domaine.
Présentement, je travaille à titre d’auxiliaire d’unité à la RSL les fins de semaines et je suis inscrit au programme de préposé. Je vais graduer dans les prochains mois et j’offrirai mes services aux résidents de Bruyère.
Darius S. - Bénévole à la résidence Saint-Louis
J’ai commencé mon implication bénévole hebdomadaire à la résidence en 2017. J’ai rapidement développé un lien solide avec certains résidents et eux, comme moi, anticipions avec impatience nos rencontres pour discuter et faire des promenades à l’extérieur. La pandémie de la COVID-19 a soudainement interrompue les visites amicales. Les résidents me manquent, et je suis émerveillé par la résilience dont ils ont fait preuve depuis près d’un an maintenant… vivre de longues périodes d’isolement à un moment de notre vie où les contacts humains sont si précieux n’est pas une chose facile. Malgré tout, ils trouvent le moyen de rester positifs et ont espoir de jours meilleurs à l’approche du printemps.
Le personnel de la résidence Saint-Louis a fait preuve d’un dévouement exceptionnel depuis le début de la pandémie et je suis vraiment reconnaissant pour l’organisation de visites virtuelles par FaceTime avec les résidents. Il s’agit d’une belle façon de prendre des nouvelles d’eux et de leur rappeler que je ne les oublie pas. Avec l’arrivée des vaccins, j’ai espoir que je pourrai bientôt reprendre mes activités bénévoles à la résidence.
J’anticipe avec joie la chance de retrouver les résidents, de faire des promenades à l’extérieur avec eux pour admirer toute la splendeur de la nature, et surtout d’écouter tout ce qu’ils ont à me raconter. La Résidence Saint-Louis fait partie de ma communauté.
Chantale S. - Thérapeute en loisirs
Je m’appelle Chantale et je travaille à Bruyère depuis 1995 en tant que thérapeute en loisirs. C’est bien ça..thérapeute en loisirs. Sauf, attends, tout ça a changé en 2020 avec l'arrivée de ce vilain virus. Par un beau jour, j’organise mes activités avec mes patients, je fais ce que je fais de bien, et j'aime ce que je fais. Pour ceux et celles qui ne le savent pas, c’est très valorisant une carrière dans les loisirs. C'est un des plus beaux métiers dans le domaine de la santé, puisque le loisir donne une opportunité au patient de choisir, de créer et de se libérer de ses soucis, ne serait-ce que pour quelques instants. C’est beau, non?
Mais voilà que tout change subitement par une mi-mars 2020: annulation des activités sociales et les rassemblements sont dorénavant interdits. Dès maintenant on doit se tenir loin des uns et des autres pour le bien collectif. Aucun loisir pour l’instant, c’est comme ça malheureusement. Alors je fais quoi moi, en attendant, celle qui travaille en loisirs? Aucun souci Chantale, on va te réinventer un poste qui reflète l'actualité du jour, et tu vas voir ça va bien aller. Un nouveau poste? Me réinventer? Détails SVP! J’apprends par la suite, à mon soulagement, que je ne traverserai pas seule ce chemin de l’inconnu, et qu'on sera quelques-uns à vivre ce qu’on apprendra un peu plus tard, le ‘’tsunami’’ de notre petit, presque minuscule département du service de soutien thérapeutique (TSS). ‘’Le but’’: Ensemble, nous allons relever les défis, nous réinventer et minimiser les dégâts potentiels de cette aventure, disons-le: ‘’à l'aveuglette''! Alors, ça veut dire que, si je tombe, nous tombons ensemble? C’est rassurant, et je respire déjà un peu mieux. Aucun loisirs et les bénévoles rentrent chez-eux jusqu'à nouvel ordre, alors on fait quoi? On ne peut pas laisser tomber les patients dans un temps pareil! Il faut avoir un plan: ‘’Un produit en temps covid’’! Notre département reçoit un mandat important: celui de créer un nouveau poste qui aura pour but d’alléger l’angoisse anticipée, non seulement de nos patients mais du personnel hospitalier, qui est lui aussi, fragilisé par la crise actuelle . Tout un défi et le poste affichera le nom d’auxiliaire d'unité (ou bien le terme plus connu: Unit Support Worker). Un auxiliaire tu dis? Mais ça fait quoi un auxiliaire? J'explique: Un auxiliaire c’est une personne qui assumera toutes sortes de tâches à l’étage et qui comblera pleins de besoins, parce que, avouons-le, les besoins seront multiples, et surtout en temps de pandémie! Voici une liste abrégée: faire la lessive des patients, assurer les appels téléphoniques et virtuels entre patients et familles, assister et nourrir les patients, soutenir les patients et le personnel..être présent.
‘’L’auxiliaire recherché’’ a les qualités suivantes: c’est une personne qui veut se lever du lit en temps de crise, elle aime apprendre, elle sait parler au bon moment et elle tend l’oreille attentivement, elle aime travailler en équipe, elle a le bien-être des patients à coeur et elle accepte que demain ne sera pas comme aujourd'hui. Bref, un bon auxiliaire c’est tout ça et plus encore! La barre est haute, en effet! Alors les jours, les semaines et les mois passent, et la petite équipe dont je fais partie depuis déjà un an, travaille sans relâche pour recruter, former et guider une équipe d’auxiliaires dans un poste qui cherche tranquillement et peu à peu sa place en temps de pandémie. Il y a des jours où ça va bien, et il y a des jours où ça va moins bien, mais on comprend que c’est ainsi lorsqu’un nouveau concept voit le jour. Chose certaine: grâce au temps, la tempête s’est calmée quelque peu et l’auxiliaire va continuer de bâtir son image digne de Bruyère.